
RDC : Constant Mutamba de plus en plus acculé par la justice

Le ministre d’État, ministre de la Justice et Garde des Sceaux, Constant Mutamba, est au centre d’une tempête politico-judiciaire qui s’intensifie au fil des jours. Déjà visé par une première procédure judiciaire pour détournement présumé de fonds publics, le ministre fait désormais face à un second réquisitoire, cette fois pour outrage aux corps constitués, notamment à la magistrature.
Le procureur général près la Cour de cassation, Firmin Mvonde, a transmis ce vendredi 30 mai un nouveau réquisitoire au bureau de l’Assemblée nationale, sollicitant une nouvelle fois l’autorisation d’instruction à charge du ministre. Cette demande fait suite à une déclaration publique faite par Mutamba le 26 mai dernier, lors d’un échange avec les cadres de son ministère au Palais de justice. Le ministre y dénonçait un « complot judiciaire à caractère tribal » visant à le déstabiliser, tout en affirmant : « La révolution judiciaire commence » et en répétant ne pas craindre la prison.
Ces propos, jugés offensants par le parquet, sont considérés comme constitutifs de plusieurs infractions : outrage envers les membres du gouvernement et les magistrats, incitation à des manquements envers l’autorité publique, injures publiques et menaces, sur base des articles 75, 135, 136 et 159 du Code pénal congolais.
De son côté, Devant ses agents le 26 mai, Constant Mutamba a remis en cause la légitimité du procureur général à initier une telle procédure mai :
« Celui qui fait l’objet d’enquêtes ne peut pas initier une action contre le ministre de la Justice. C’est une faute disciplinaire grave. Je vais tirer toutes les conséquences du droit », a-t-il déclaré.
Il est allé plus loin en qualifiant le procureur de « kabiliste » et en affirmant être victime d’un acharnement politique :
« Il voulait m’humilier pour ternir ma réputation. Dites-leur que le dieu de mes ancêtres est plus fort que leurs dieux », a-t-il lancé dans un tonnerre d’applaudissements devant ses agents.
Mutamba a même enjoint ses collaborateurs, dont le secrétaire général de son ministère il y a quelques jours, à ne pas répondre aux convocations judiciaires, dénonçant une tentative de déstabilisation institutionnelle.
Ce second réquisitoire intervient moins de 24 heures après l’adoption, en séance plénière à l’Assemblée nationale, d’une résolution autorisant une instruction judiciaire à l’encontre du ministre dans une autre affaire. Il est accusé de détournement de près de 19 millions USD sur les 39 millions destinés à la construction de la prison centrale de Kisangani, dans la province de la Tshopo.
La Commission spéciale chargée d’examiner cette première demande du procureur avait jugé le dossier suffisamment crédible pour autoriser l’instruction. Deux députés, Fontaine Mangala et Willy Mishiki, avaient déjà initié des interpellations parlementaires à ce sujet.
Alors que la tension entre le ministre de la Justice et le pouvoir judiciaire atteint un point critique, une question s’impose : jusqu’où ira cette confrontation inédite au sommet de l’État congolais ? Le bras de fer entre Constant Mutamba et Firmin Mvonde, qui révèle les fragilités internes de l’appareil judiciaire congolais, risque d’avoir des conséquences politiques majeures.
Dans une démocratie où l’indépendance de la justice reste fragile, cette affaire soulève de profondes interrogations sur la séparation des pouvoirs et sur la responsabilité politique au sein du gouvernement. La balle est désormais dans le camp de l’Assemblée nationale, qui devra trancher à nouveau sur la recevabilité du second réquisitoire.
Clément softly
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